mercredi 21 avril 2010

Le blues du mercredi*

Je suis une personne très attachée à elle-même. Vous, vous avez dû le constater en dénombrant les billets parus sur mes deux blogs ainsi que toutes les chroniques et autres topics dans lesquels je donne généreusement mon avis sur tout et n'importe quoi. Moi, je m'en suis souvenu en rangeant mon bureau. J'ai des centaines de feuillets noircis d'encre. Des centaines de pages de journaux intimes, carnets de route, notes pour des dizaines de projets, lettres jamais envoyées.
Tous ces mots ancrés au papier. Toute ma vie.
J'ai tout gardé, et je comprends pourquoi à chaque fois que mes yeux croisent par inadvertance un reflet de moi. Un écho des jours passés. Je pense à toutes ces choses rêvées, imaginées, à toutes ces émotions, tous ces souvenirs. Peut-être que j'accorde trop d'importance à mon propre être. Peut-être que les détails de mon parcours sont insignifiants. Peut-être que pour grandir, il faut, non pas se souvenir, mais cesser de le faire. Je ne sais pas. Je ne crois pas. Quand je relis toutes ces lignes, je sais à nouveau qui je suis. Je sais bien, nous sommes des milliards et nous ne sommes que poussière. Peut-être que si nous cessions de nous regarder le nombril, nous accepterions mieux notre place dans l'univers. Peut-être pas.
Parce que c'est quand je me souviens que je retrouve le fil. C'est seulement de cette manière que je me sens complète. Une. Cohérente. Vivante.
Je pense à toutes ces personnes qui n'ont aucun moyen de traverser le miroir. Aucune façon de relever les morts, de parler aux fantômes, de susciter les rêves. Je les plains. Je les plains parce que c'est triste d'oublier. On n'est déjà pas bien intelligents, pas bien costaux. On vit trop peu longtemps, trop vite. Nous ne sommes que des météores. Mais moi, j'ai tous ces souvenirs que je peux rouvrir. Je peux me rendre compte que j'ai vécu. Dans ma mémoire, il n'y que des images floues et des souvenirs tronqués. Alors que tout est écrit noir sur blanc. Je peux me retourner et dire : j'ai vécu. J'ai rêvé, j'ai pleuré, j'ai pensé. Les autres, ils ne peuvent pas. Ils ne se souviennent plus. Et ils meurent tristes, si ce n'est aigris.

C'est très bizarre de remiser toute ma vie dans une cave.

J'ai commencé à écrire régulièrement quand j'étais en sixième. Ma mère m'avait offert un mignon petit carnet cadenassé avec un chaton sur la couverture. Le ramassis de bêtises enfantines que j'ai collecté dedans! A l'époque, j'avais rempli tout un cahier de brouillon de contes de fées que j'avais inventés. Je voulais l'offrir à ma prof de français, mais je crois que je n'ai jamais osé. Je ne me rappelle pas.

Je vais vous montrer un truc. C'est rigolo:


Ça, c'est un mini-journal que j'ai fait quand j'avais, je sais pas, quatorze ans? L'édito était signé "Dark Star" et ça parlait de la culture goth (j'imagine même pas comment les Vrais Goths m'auraient conspuée :D) J'avais scanné plein de photos, imprimées en couleur, collées sur du canson. C'était très joli, même si le contenu n'avait aucun intérêt ;p


Ça, bah, c'est le contenu d'une pochette. Ça se voit pas vraiment, mais elle est très épaisse - environ trois centimètres. Je voulais prendre en photo mes carnets, doit y'en avoir six, mais j'avais plus de batterie (heureusement pour vous).

Alors, voilà. J'ai l'impression que je vais partir avec le cerveau tout vide. Je m'en rendrai pas compte tout de suite. Mais, d'ici quelques mois, je m'apercevrai que le temps m'a lessivé les neurones. Je me dirais qu'il me semble bien avoir ressenti un truc, un jour, mais je m'en souviendrai pas. Je me rappellerai seulement des événements, et encore, seulement quelques uns.

J'embarque quand même une pochette. Celle avec mes notes pour tous les projets d'écriture , à venir ou en cours. Dedans, il y a des manuscrits jamais utilisés pour mon roman (et des idées bien, zut, faudra que j'essaie de les exploiter), les prémices du bouquin pour enfants que j'avais commencé avec Jeanne, les brouillons pour l'histoire à quatre mains avec Maloriel, des notes correctives pour le cycle de nouvelles dans le Labyrinthe, The Little Blue Box et sa suite, les recherches expérimentales autour des dés, des cours d'informatique et des idées pour le site... Pfiou, je crois que c'est à peu près tout. C'est pas surprenant que je finisse jamais rien.

Notes en vrac

Un jour, Régina, tu es morte dans un réfrigérateur. On était avec Claire dans un dédale de couloirs et les frigo, c'était le seul moyen pour passer d'un niveau à l'autre. Ils servaient de téléporteurs, mais le tien n'a pas fonctionné.

Quand j'étais ado, j'ai écrit un texte qui s'appelle "La ballade de Morticia". Grandir, c'est quand même génial.

Mylène, elle me manque quand même un peu. Julia aussi.

Il faut vraiment que je trouve des titres aux textes que j'écris. Ce serait plus pratique que d'indiquer le nom des personnages sur les pochettes pour m'y retrouver.

Avoir un blog, c'est plus marrant que d'écrire un journal, même si c'est moins malin.



*Parce que mercredi, c'est jour de déménagement.

1 commentaire:

  1. Intéressant. Je n'ai jamais eu de journal intime, bien que certains textes peuvent être considérés comme tels. Avant d'emménager sur Nantes, j'ai jeté des centaines de feuilles manuscrites, toute mon adolescence, aux oubliettes. Et il n'y a que peu de temps que je tape au clavier mes textes… donc je n'ai plus rien. Je ne sais toujours pas aujourd'hui si c'était une bonne chose. C'est juste que… ce que j'ai écrit, même ce qui date de 15 ans, est toujours en moi ; garder tout cela n'a pas vraiment de sens, sauf pour rigoler de ma prose de l'époque (ça fait quand même une bonne raison ; tant pis).

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