vendredi 12 novembre 2010

Down in the dumps

(Les anglais exagèrent toujours un peu ;))

Hier, nouveau passage à vide, donc. J'avais passé la journée à essayer de me relaxer sans y parvenir de façon définitive et j'allais au boulot avec l'impression de descendre à l'échafaud. Passer au bureau prendre connaissance de mon emploi du temps et me taper une cliente conne ont eu raison de moi : si mon superviseur ne m'avait pas proposé de prendre ma caisse cinq minutes en voyant la gueule que je tirais, c'est pas dans la salle de repos que j'aurais éclaté en sanglots, mais en plein milieu du magasin.
La semaine prochaine donc, je travaille tous les soirs. Je fais la fermeture quatre fois sur les cinq jours où je bosse. Autrement dit, je ne verrai pas Mathias de la semaine. Quand je rentrerai du boulot il sera déjà couché, quand il se lèvera le matin c'est moi qui dormirai encore. C'est ridicule, mais c'est juste comme ça depuis trois mois, et là c'en a juste été trop.
Aujourd'hui pourtant, je vais très bien. Peut-être parce que même si je finis à 22h, Mathias sera en week-end et qu'on pourra passer la soirée ensemble. Peut-être parce que demain je travaille le matin et que j'en ai rien à foutre d'y aller avec la gueule de bois (je devrais, pourtant, car ce jour-là on me met à la caisse où il faut aussi répondre au téléphone et qu'en plein rush je finis par tout confondre. M'enfin, je n'ai jamais, comme ma collègue Manon, finit une annonce haut-parleur par "merci bonjour!" ou, comme Homer, oublié le nom du supermarché dans lequel je travaillais. J'ai par contre, à 9h du matin, la fâcheuse manie de souhaiter une "bonne soirée" à mes clients :D)
Peut-être que c'est ma longue méditation d'hier qui a porté ses fruits avec un peu de retard. Ou peut-être que c'est de relire l'intégralité de ce blog, me permettant de me remémorer qu'il s'est passé plein de choses cool depuis qu'on est arrivé. Ou peut-être encore parce que je sais que je verrai Muriel et Scott dans deux mois.

J'ai quand même constaté que, depuis la fin du mois de juillet, les choses se sont beaucoup ralenties. Avec Mathias au taf et la routine qui s'installe, on a eu nettement moins de surprises ces derniers temps. Là où au début nous ne voyions que des possibilités, maintenant nous constatons que les opportunités se restreignent, tout en pouvant nous permettre d'envisager des choses plus ambitieuses - mais donc plus longues à obtenir.

Je ne sais pas bien où j'en suis, à vrai dire.

Hier j'ai pourtant passé une excellente journée. Il faisait un temps superbe et j'avais envie d'aller marcher. Je suis allée au bord de la rivière. J'ai trouvé une pierre plate en contrebas du chemin, juste au bord de l'eau, sur laquelle je me suis posée. J'ai bien dû rester une heure à y réfléchir, à me concentrer sur la lumière clignotant sur mes paupières, à profiter de sa chaleur sur ma peau, à savourer le vent qui passait sur ma joue. Quand je suis partie, j'étais bien. Juste bien, comme je l'ai rarement été. J'ai été acheter des fleurs, depuis le temps que j'en avais envie. De jolis lys blancs. Et je me suis offert un croissant que j'ai mangé à la maison, accompagné de thé. Parfaitement sereine.
L'angoisse reprenant progressivement ses droits, j'y suis retournée l'après-midi. J'y ai fait des expériences spirituelles passionnantes mais presque impossibles à expliquer à quiconque ne s'y intéresse pas, donc je laisse planer le mystère :)

Aujourd'hui, je n'ai strictement rien fait : pas lu, pas écrit, et je m'en fous complètement, parce que c'était une chouette journée, passée à écouter de la musique cool, à envoyer des e-mails, à glandouiller encore et que c'était très bien comme ça.

Mais je ne sais quand même pas comment je dois envisager l'avenir. Non, je ne sais pas du tout où j'en suis.

Chapitre 3

Il faudra repartir, bien sûr. Rebondir, après le constat étonné, un peu amer, que l'on n'apprend rien des gens. Ici, ailleurs... Les mécanismes sont aisément identifiables. A défaut de les excuser, on comprend les parcours. On restitue la chronologie et on dessine l'aboutissement. C'est facile de trouver des raisons aux gens. On peut se tromper, évidemment. Mais la vérité n'est jamais loin. Elle est toujours à portée de main. Et parce que les gens ont de multiples raisons de faire ce qu'ils font, ils deviennent lassants. On ne peut pas leur reprocher leur manque d'ambition intellectuelle, on ne peut pas leur reprocher leur manque d'imagination... On ne peut rien leur reprocher du tout, puisque tout s'explique : environnement familial et social, génétique, histoire personnelle, opportunités et malheurs... Tout se combine toujours de la même façon. Si j'étais Annaïg, j'écarterai ces personnes d'un revers de la main, avec un reniflement hautain, arguant qu'on ne fait jamais que ce qu'on veut et que c'est bien de leur faute si elles sont empêtrées dans leur quotidien sans envergure. Mais je ne suis pas Annaïg et elle n'est pas plus maligne.

*

Lignes écrites dans un contexte de découragement, bien sûr, de déprime partagée par Mathias et moi, et dont le sens va au-delà du constat imposé par "les autres", ces milliers de personnes croisées chaque jour, qui n'ont pas plus de visages que les créatures des rêves. Au moment où j'ai écrit ça, j'avoue que j'en voulais à certains d'entre vous. Qu'il faudrait nommer pour éviter les quiproquos, ce que je ne ferai pas car il faut garder à l'esprit que c'est un blog et qu'ici j'essaie de synthétiser l'essentiel.
Disons que parfois on a des attentes vis-à-vis des autres, qu'on ne devrait peut-être pas mais que ça paraît inévitable dans le cadre de l'amitié. Et quand ces attentes sont déçues, Mathias et moi passons souvent du temps à en analyser les causes possibles, et bien qu'on passe sûrement à côté de la vérité, puisque nous ne sommes plus là pour en discuter avec vous, nous vous trouvons tout un tas d'excuses. C'est facile, et c'est ça qui est triste.
Que les choses soient claires (je m'aperçois qu'elles ne le sont pas du tout) : quand je parle de manque d'ambition ou de quotidien sans envergure, pour le coup, ce n'est absolument pas à quiconque d'entre vous que je fais allusion. Là, j'ai en tête des gens que je fréquente ici. (J'aimerais cependant que les Québécois qui possèdent l'adresse de ce blog ne se sentent pas visés non plus). Le lien entre les deux paragraphes, c'est le contexte de déprime globale.

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Ce qui nous mène où?
Conclusion au paragraphe n°1 : repartir, bien sûr. Ou que ce soit. Mais forcément plus loin. S'éloigner, progressivement, de ce que l'on connaît le mieux. Mais les individus qui composent les pays non-occidentaux ne sont certainement ni plus ni moins malins. Il faut trouver... Quelqu'un d'autre. Un pratiquant soufi, un sorcier mexicain, un moine bouddhiste, que sais-je... Un sage. Quelqu'un qui a les moyens matériels d'obtenir des moyens spirituels. Tout ce que j'aimerais, c'est être surprise. Au moins une fois.
Et le paragraphe n°2? Je ne sais pas. L'amitié est bien trop compliquée pour être discutée à distance. Les malentendus dégénèrent bien trop vite. Sachez juste que j'ai le mal du pays parce que vous me manquez.